Metal : l’échappée

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L’extraordinaire groupe polonais Behemoth

J’aime la plupart des styles de musique. Je sais que quand on demande à quelqu’un quel type de musique il ou elle écoute, c’est la réponse qu’on reçoit le plus souvent. Ça n’est pas pour autant une réponse facile alors j’aimerais nuancer mon propos: j’aime tous les genres de musique dans la mesure où ils peuvent produire quelque chose qui me parle. Il est évident que j’aime certains styles plus que d’autres pourtant, comme tous ceux qui aiment « un peu tout ». La musique en général et tous les innombrables genres qui s’y rattachent sont bien assez larges et riches pour qu’on décide de ne se consacrer qu’à un seul style, pour le connaître à fond ou continuer à s’intéresser un peu à tout si on préfère picorer. Il y a ensuite l’épineuse question des genres et des sous-genres, comme en science l’étude de l’infiniment petit est au moins aussi intéressante que celle de l’infiniment grand, il y a donc à boire et à manger. Pour moi, discourir de musique, comme de littérature ou de cinéma, comme de sciences ou au final de n’importe quel sujet, est toujours en arriver à une seule conclusion: si nous nous y connaissons suffisamment, c’est uniquement pour nous rendre compte que nous n’y connaissons rien du tout (un type pas très connu, Socrate je crois, disait à peu près la même chose mais je dois confondre).

Pourtant aujourd’hui j’ai tout de même envie de parler d’un style de musique en particulier, qui me fait vibrer depuis l’âge d’environ 17 ans, c’est à dire plus tard que la plupart des gens qui ont commencé à s’y intéresser à leur grande époque rebelle. Je suis ce qu’on appelle une metal head, une fan de Metal. Cette confession m’attire souvent le même type de remarque, comme quoi déjà je n’ai pas le look (je ne m’habille pas avec des corsets, je ne me teins pas les cheveux couleur aile de corbeau, je ne me maquille quasiment pas donc encore moins avec le teint blanchi ou les yeux saturés de khôl, j’en passe et des clichés) et aussi que, eux, aimaient bien le Metal mais c’était au lycée, durant leurs « années folles » et que depuis ils sont passés à autre chose, considérant souvent le genre comme certifié trop adolescent pour continuer de s’y intéresser ensuite. Et puis il y a les autres, ceux qui n’en sont jamais sortis, voir même qui s’y sont enfoncés encore plus profondément au fil des années. Pour ça je voudrais rendre un hommage discret à mon amie A., dont je suis officiellement la petite Padawan car elle est celle qui m’a fait découvrir l’immense majorité des groupes que j’écoute aujourd’hui, depuis 6 ans que nous nous côtoyons. C’est elle que j’ai accompagné en concert, que j’ai rejoint en festival, qui m’a prêté des CDs (oui nous étions un brin old school), qui m’a présenté ses amies et amis à cheveux longs et à cervicales surentraînées. J’ai découvert grâce à elle une communauté que je ne soupçonnais que peu, à l’époque où cette musique était plutôt un loisir solitaire. J’allais déjà dans des concerts ou des festivals mais c’était plutôt des petits festivals roots/sarouel/beuh/accordéon qu’on trouve par centaines dans le Sud de la France quand viennent les beaux jours et qui ont fait la joie de mes années lycée et même bien après. Autant dire que ça changeait assez radicalement mes habitudes.

Je ne suis pas fana des grands festivals, ne serait-ce que financièrement parlant il est plus que probable que le Hellfest ou le Waken ne se concrétisent jamais pour moi. Aussi quand A. m’a parlé il y a des années du MetalDays, festival de taille moyenne comportant seulement deux scènes, planqué dans les montagnes slovènes et jouxtant une sublime rivière, je n’ai pas hésité très longtemps. Je vivais à Budapest à l’époque et un trajet jusqu’à Ljubljana ne demandait que 6 heures de bus. Les 2 éditions du festival auquel j’ai eu la chance de participer m’ont fait vivre des moments incroyables, découvrir des groupes dingues et rencontrer de nouveaux potes. J’ai pu découvrir une communauté vraiment très accueillante et saine, contrairement aux divers clichés habituels, qui vénérait la bière et le Jägermeister plus que les drogues dures. Et j’y suis retournée encore, j’ai pénétré plus profondément la scène Metal budapestoise, très active, qui n’attendait plus que moi.

Depuis mes 17 ans et la première fois où ma cousine m’a fait écouter Nightwish (d’ailleurs également le premier groupe de Metal que j’ai été voir en concert), je n’ai jamais pu retrouver un autre type de musique avec cette puissance d’évocation mentale. J’étais dès le début fascinée par les images que me projetait mon cerveau enivré à son écoute, ça me transportait littéralement, ça me transporte toujours malgré l’accoutumance. J’ai une affection particulière désormais pour le Doom et l’Atmosphérique, pour leur rythme à la fois lent et plein et pour leur puissance évocatrice. Les deux seules fois à ce jour où j’ai pleuré en concert, mais j’espère qu’il y en aura d’autres, c’était pour cela. Une fois à Budapest devant Sólstafir lors de leur tournée pour l’album Ótta et une autre fois au MetalDays en regardant s’époumoner le chanteur de Ghost Brigade, toujours aussi émerveillée de voir des voix pareilles sortir de corps aussi malingres que celui de Manne Ikonen qui visiblement en plus ce jour-là avait déjà beaucoup trop bu.

C’est sûrement dû en grande partie à cet univers qui emprunte à tout ce qui généralement ne fait pas partie de notre quotidien et ayant donc un potentiel d’évasion gigantesque. Le Moyen Âge, le paganisme, l’ode à la beauté de la nature, la nuit et les monstres qui la peuplent, le romantisme au sens dix-neuvième siècle du terme. La culture nordique aussi vu qu’énormément, si ce n’est la majorité, des groupes viennent d’Europe et particulièrement des pays scandinaves, ou d’Amérique du Nord. Avec le corolaire déplaisant que cela en fasse une musique particulièrement estampillée de « blancs », malgré l’arrivée récente de groupes venus des pays du Maghreb, du Moyen Orient et d’Asie, spécialement du Japon. Le Brésil dans ce contexte fait figure d’exception puisque la culture Metal y a pris un essor particulier et inattendu dont le succès ne se dément pas, cas exceptionnel en Amérique du Sud. Beaucoup d’afficionados Brésiliens peuvent être rencontrés en festival en Europe par ailleurs lorsque la scène dans leur pays ne leur suffit plus. Mais on ne peut pas dire qu’ils fassent augmenter la mixité dans le monde du Metal, la plupart d’entre eux étant du Sud du pays et blancs également. Le cas du nouveau chanteur de Sepultura, Derrick Green, noir de peau, fait toujours figure d’exception.

Autre public touché par l’absence de représentation dans le Metal : les femmes. Tout du moins les femmes dans des groupes autre que symphoniques et faisant autre chose que d’assurer le chant lyrique ou les chœurs quand il y en a. Les groupes comme My Dying Bride où Lena Abé assure la basse sont rares, tout comme Arkona où la chanteuse Maria Arkhipova sort du registre classique des chanteuses de métal en assurant les grunts avec son timbre de voix si incroyable et souple. Et si la féminisation du public s’accélère vitesse grand V depuis plusieurs années, on est tout de même encore loin de la parité (voir cet article)

Je dois avouer un certain penchant pour la musique mélancolique (merci de ne pas dire déprimante), c’est extrêmement apaisant à la fois dans les moments durs et les moments doux. Les courants sont innombrables dans le Metal comme dans tous les genres de musique et à part quelques exceptions près, le hard ou l’extrême ne me conviennent pas trop, contrairement à certains puristes je ne parviens pas à trouver les sonorités ou la musicalité agréable (voir même à voir si elle existe du tout). Les balades et les grandes envolées lyriques seront toujours ce qui aura ma faveur, j’espère de nouveau pleurer devant une scène à cause d’un mélange trop confus d’émotions prochainement.

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