Les Injonctions Contradictoires #3 : le paradoxe de la salope

Ci-joint ma chronique pour le Tafeur, magazine musical de la région Montpellieraine paru le 27 juin, destinée à paraître tous les deux mois.

S’il y a bien un domaine dans lequel les injonctions contradictoires sont légion alors qu’on est pourtant supposés y être à peu près tranquilles (et d’une!), c’est bien la sexualité. Nous sommes plus que jamais encouragés, ou devrais-je dire harcelés à nous épanouir, à respirer le bonheur, à l’exhaler par tous les pores et cela passe nécessairement par une sexualité débridée.

Débridée oui car apparemment se contenter de baiser en missionnaire une fois par mois avec un seul partenaire et s’en porter très bien vous étiquèterait automatiquement comme personne très ennuyeuse, tous genres et sexualités confondus.

Mais avec des différences notables tout de même. Les femmes se débattent avec le fameux paradoxe de la salope (c’est le titre) qui les encourage à la fois à perdre leur virginité le plus tôt possible, à multiplier les partenaires, les pratiques (je ne vais pas vous faire un dessin, vous êtes grands), à avoir de l’expérience tout en leur faisant bien comprendre qu’au-delà d’un certain nombre de partenaires (qu’on se garde bien de définir, comme c’est pratique), elles n’ont plus aucune valeur propre, le tout à grand renfort de métaphores vaseuses à base de clefs et de serrures.

Les hommes eux aussi certes se débattent avec tout ça, comme de devoir revendiquer le plus de partenaires possibles (féminines de préférence), l’obsession de la performance (plus dur, plus fort, plus longtemps) inspirée de la pornographie, une peur plus ou moins latente de l’homosexualité car un homme un vrai doit être totalement imperméable à la beauté des autres (j’y reviendrai).

Mais tout cela n’est pas contradictoire au final car en tant qu’homme on s’en sort tout à fait bien dans la société en respectant les règles du jeu, si discriminatoires qu’elles fussent. Tandis qu’une femme sera toujours perdante quoi qu’elle fasse. Qu’elle refuse le sexe et elle sera étiquetée frigide ou prude, des dénominations au moins aussi recherchées que celle de salope qui lui collera au cul si elle a le malheur de le rechercher (le cul, suivez un peu).

Avec tout ça et  bien plus encore sur les épaules, il est peu probable de pratiquer le sexe décomplexé et épanouissant dont on nous rabâche sans cesse combien il est essentiel à notre bonheur terrestre. Et parmi les injonctions contradictoires sur le sujet, c’est la plus injuste de toutes.

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