Le culte de la précocité

Je devrais lire Bourdieu.

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(Film partenaire de cet article : Before sunset de Richard Linklater avec Julie Delpy et Ethan Hawke)

Je me fais cette réflexion de plus en plus souvent ces derniers temps, sans pour autant passer à l’acte. C’est un sport de combat, il faut y être préparé psychologiquement.

La dernière fois que je me suis faite à moi-même ce constat, ce fut en lisant cet article de Annabelle Allouch dans le Monde Diplomatique, portant sur le projet de sélection à l’université, dont je ne suis l’actu que de très loin. Et une phrase, plutôt une expression, m’a sauté aux yeux, si fort qu’elle est devenue le titre de cet article.

Jugez plutôt :

La loi fait ainsi reposer sur l’élève — et sur des choix effectués à 15 ou 16 ans — la responsabilité de sa réussite ou de son échec. Fini les errements, les tâtonnements que permettait dans une certaine mesure l’ancien système : désormais, chacun doit anticiper la place qu’il veut se donner dans la société, sous peine qu’on la lui impose. Bien sûr, de ce point de vue, la réforme n’invente pas tout. Elle renforce des logiques déjà présentes dans l’univers scolaire, en particulier ce que Pierre Bourdieu nommait dès 1964 la « culture de la précocité », c’est-à-dire la prime donnée aux trajectoires linéaires et aux « voies royales »

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Le miracle de l’amitié féminine

Note : j’inaugure ici une nouvelle série d’articles consacrés à l’amitié, que j’avais déjà un peu traité sur ce blog, le moment est venu pour se lancer !

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, l’amitié féminine ne va pas de soi.

On pourrait se dire que ce qui ne va pas de soi devrait plutôt être l’amitié entre une femme et un homme, qui ne saurait exister car le désir de l’un ou de l’autre finirait fatalement par s’imposer et corrompre ce sentiment au départ supposé pur. Pourtant la friendzone existe aussi entre filles si les orientations sexuelles, les sentiments ou les attirances divergent.

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Daria et Jane ont été très en avance sur leur temps dans presque tout

Cette porte ouverte enfoncée, abordons le cas ici de l’amitié qui peut exister entre deux femmes hétérosexuelles ou aux orientations sexuelles différentes mais où l’attirance ne joue aucun rôle : pour que celle-ci puisse naître, se développer et se fortifier, il faudra tout d’abord avoir fait la paix avec les différentes représentations culturelles de l’amitié féminine et les nombreuses injonctions contradictoires qui en découlent.

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Les Injonctions Contradictoires #4 : faut-il être heureux pour être heureux?

Ci-joint ma chronique pour le Tafeur, magazine musical de la région Montpellieraine paru le 16 octobre dernier, durant ma période de césure donc, d’où cette publication tardive! C’est en hiatus de leur côté aussi en ce moment, aucune idée de quand va sortir la prochaine donc!

source graphicreflections.org

Vaste question qui nous obsède plus que de raison, depuis un certain nombre d’années que je n’identifie pas. C’est une tendance après tout, pas la date de parution d’un bouquin, mais on est forcé de constater que cela prend beaucoup de place dans nos vies. Cela, c’est l’injonction au bonheur. Vous me direz avec toute la sagesse qui vous caractérise que je me plante complètement et que l’injonction au bonheur n’est en rien contradictoire. On veut être heureux, on cherche des solutions pour ça, point barre.

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Letter to my seventeen years old self

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Hey you! How are you doing? First things first, how old are you now? Just to help me recall what is going on in your life. 17? Wow! Almost an adult, soon enough you will be able to vote! Yes I know, a little too late this time, you will turn 18 in July and this super important election, the first one you old enough to understand and care about is happening in May. It’s a shame but don’t worry, there will be plenty of others.

I know it is a bit frustrating. I know also I am not being super helpful right now and you resent me for putting pressure on you, as I said earlier that you are “almost an adult”. I should know you don’t want to hear that, especially from me, you are hearing it enough all day long and it starts to get terrifying. In June you will have this big exam in order to finish high school. Don’t worry about that please, you will pass it. Even if teachers and parents are babbling about it since you’re eleven, it is actually not such a big deal. You are a good student, you own a good memory. So just learn, they are not even asking you to understand anything about what you are learning, it will be enough for this.

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Lettre à la moi de 17 ans

Note: cet article a été inspiré par la sortie du livre Lettres à l’ado que j’ai été, sorti le 14 mars, coordonné par Jack Parker et rassemblant de fines plumes du monde du spectacle et de l’Internet. Pas lu encore, un jour peut-être!

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Coucou toi ! Alors, est-ce que ça va comme tu veux ? Je devrais peut-être d’abord te demander quel âge ça te fait là maintenant, histoire de savoir à peu près où tu en es en ce moment. 17 ans ? Mais dis donc, c’est que ça pousse, incroyable, tu es presque une adulte maintenant! Tu te rends compte que bientôt tu vas pouvoir voter ? Bon ok, je ne remue pas le couteau dans la plaie, ça n’est pas très sympa. Tu vas avoir 18 ans en juillet et l’élection présidentielle va avoir lieu en mai. Tu vas donc rater à quelques mois près l’occasion de donner ton avis sur la première élection à laquelle tu t’intéresses et dont tu comprends à peu près les enjeux, c’est râlant mais enfin c’est comme ça, tu vas avoir l’occasion de te rattraper, ne t’en fait pas !

Je sais, ça n’aide pas trop à faire passer la frustration mais là pour le moment je ne peux pas trop faire mieux que ça. Là en revanche où je peux faire mieux, c’est en arrêtant de m’extasier sur le fait que tu es presque une adulte parce que je sais, oh oui je sais, à quel point c’est compliqué pour toi en ce moment. Cette assertion, tu l’entends sans arrêt, tous les jours, sous toutes les formes et venant de personnes différentes chaque fois et cela te terrifie désormais autant que cela t’ennuie. Que moi, du haut de mes 28 ans, je vienne m’ajouter à cette liste, ça ne va certainement pas t’aider et pourtant, je suis là un peu pour ça, tu vas voir.

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Je reviens

Ou en tout cas j’ai envie.

Lorsque j’ai publié mon dernier article sur ce blog en septembre dernier, je ne savais honnêtement pas si j’allais un jour y revenir. Je m’embarquais alors dans une aventure plutôt étonnante dont je n’avais aucune idée d’où elle allait me mener (et en fait, je ne sais toujours pas). Tout ce que je savais c’était que cette aventure et ce blog ne pourraient pas coexister ensemble et que j’allais devoir céder l’un à l’exigence de l’autre. Ce fût le blog donc, comme vous le savez.

Je vous raconterai bientôt cette aventure, où en tout cas comme elle a commencé, dans un prochain article. Maintenant parlons un peu de choses sérieuses: j’ai adoré cette régularité qui a été la mienne pendant ces 8 mois, un article par semaine, une traduction par semaine, c’était le pied vraiment. Mais si j’ai arrêté tout d’un coup ça a aussi été parce que ça m’a énormément épuisé créativement. Aussi je ne pense pas revenir à ce rythme hebdomadaire maintenant pour Indices Pensables, essayons déjà de voir ce que donnerait un rythme bimensuel, comme ça, pour voir…

Pas encore décidé par contre si j’allais recommencer aussi les traductions et les webreviews ceci dit, ma cure de média a eu l’effet escompté (ainsi que j’en parlais dans mon dernier article, à savoir une raison de plus de faire une pause dans le blog) et je n’ai plus grand chose à y mettre… mais le moins qu’on puisse dire c’est que ça fait du bien!

Mais si je reviens après avoir pourtant beaucoup hésité, c’est parce que les derniers mois que j’ai passé sans écrire m’ont épuisé tout court et ont été parmi les plus éreintants de ma pourtant plus si brève existence. Ces derniers mois j’ai dû aller puiser dans des ressources mentales et physiques dont j’ignorais même que je les possèdais. Je ne suis pas mécontente du voyage mais l’issue en est finalement bien plus incertaine que je me plaisais à l’imaginer en m’y embarquant de mon plein gré alors même que personne ne m’avait forcé à le faire. Et maintenant que j’ai de nouveau du temps et des neurones qui fonctionnent à peu près correctement, je ressens à nouveau le besoin d’écrire. Parce que tout part de là en fin de compte, j’ai pensé que m’en éloigner m’ouvrirait de nouveaux horizons mais c’est l’inverse qui se produit, j’y reviens encore et toujours et bordel, ça fait du bien!

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Hey you!

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(This article will be filled with pictures having absolutely nothing to do with each other whatsoever) 

September has arrived, and it was for a really long while the real beginning for the year for everyone, even more than the first of January actually, because of school starting again. Funny how I still do feel this little heart pinch at the end of August every year, even if I am working since quite a while and basically all this summer.

But this heart pinch is really here, the same one you feel when something is getting to end and you don’t really know what will happen next. A bit like at the end of December when you think about what you learned the past year, but without the feasts and parties. At the beginning of September you don’t really have the mind to party and it is a shame, it would help to swallow the pill.

September is here so, with this feeling of new and this article is actually the number 50 on this blog. It is a lot! When I opened it last year I would never had imagine I would reach this point so fast!

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Salut à vous!

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(Cet article sera illustré de photos n’ayant aucun rapport les unes avec les autres)

Nous sommes en septembre, ce qui était pendant très longtemps finalement le moment où l’année commençait vraiment, pas tellement le 1er janvier en fait, du fait de la rentrée scolaire. Marrant comme je sens toujours à la fin du mois d’août un petit pincement au cœur du fait de l’arrivée de septembre, quand bien même je n’ai quasiment pas eu de vacances cette année et que j’ai bossé tout l’été ou presque.

Mais il est bien là ce pincement, le même qu’on a quand quelque chose se termine et qu’on ne sait pas trop ce qui va arriver après, un peu comme à la fin du mois de décembre, la fête et les festins en moins. Début septembre on a pas vraiment la tête à ça pourtant et c’est dommage, ça aiderait sans doute à faire passer la pilule.

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(Anouk Ricard. Parce que.)

Septembre arrive avec son renouveau et cet article est le 49ème du blog. Ça fait beaucoup, en l’ouvrant je ne pensais pas y arriver si vite et pourtant. Ça signifie que sa traduction sera le cinquantième article.

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Web review #6

La chanson de la semaine / The song of the week :

J’ai parlé dans ma web review d’il y a deux semaines de la série Crazy Ex Girlfriend et vous allez sûrement en entendre parler de nouveau sur ce blog, attention (même si je sais pas quand)! Comme je suis totalement obsédée par la BO de cette série comédie musicale, je ne résiste pas à l’envie de vous faire partager l’une de mes chansons préférées, qui est en plus hilarante à souhait ! (Juste pour info, ‘UTI’ en anglais est un acronyme qui signifie infection urinaire…)

Have you ever heard of the TV show Crazy Ex Girlfriend? You may find out more on this blog one day about it! 😉 Anyway, as I became recently totally obsessed about this musical show songs, I cannot resist and I want to share here one of my (many) favorites, plus they are amazingly funny !

 

 

English speaker? Please scroll until you see a young woman talking to you mysteriously !

 

FRANÇAIS

 

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Aujourd’hui dans la revue francophone, ça va parler cul. Voilà. Cette phrase se suffit à elle-même je pense.

 

  • Je ne sais pas si vous connaissez Agnès Giard? Si pas, vous en avez de la chance car vous allez pouvoir la découvrir! Cette journaliste entre autre pour Libération est aussi spécialiste du sexe et du Japon (et donc par extension du sexe au Japon) et alimente son blog Les 400 culs depuis pas mal d’années. Voici l’article qu’elle a sorti récemment, qui m’a grandement interpellé: d’un point de vue féminin, faut-il dire non pour se faire aimer? Il semblerait hélas que ça n’ait pas tant changé que ça à ce niveau depuis le XIXème siècle!

 

  • Sexe et féminisme encore, à en croire le Nouvel Obs, les femmes prenaient beaucoup plus leur pied dans les régimes communistes, grâce surtout à une certaine égalité au travail, dans les salaires et une certaine autonomie par rapport au couple et à la famille, bien plus que dans nos sociétés capitalistes depuis plus longtemps. Comme quoi, considérer les femmes comme des travailleurs comme les autres, ça peut faire changer pas mal de choses!

 

  • Cul toujours, avec l’inénarrable Maïa Mazaurette bien sûr, qui comme Agnès Giard s’indigne que le débat continue d’avoir lieu d’être sur la qualité intrinsèque des femmes qui veulent coucher dés le premier soir. En effet, ça semble incroyable que pour beaucoup de gens, nous en soyons encore là. Analyse du phénomène donc sur son blog.

 

  • Fesses, et maternité, oui ça arrive aussi parfois que le cul serve à ça. Un article du Nouvel Obs encore revient sur un post publié sur le blog de la modeuse Franco-Américaine Garance Doré qui parle avec justesse sur cette pression de l’horloge biologique qu’on impose aux femmes avec une insistance qui confine souvent à la maltraitance. Garance Doré raconte ses angoisses de femme à qui l’on assène sans cesse « qu’elle n’a plus le temps », qu’il faut « faire vite », au risque de la rendre folle.

 

  • Pas de maternité dans celui-là, sur le magazine Brain (un magazine qu’il est bien pour le lire), puisqu’on parle cette fois de baise insouciante dont les Millenials seraient supposément friands… mais en fait il semblerait que ça ne soit pas le cas, en tout cas moins que nos parents à nos âges. Ma qué pourquoi? Et bien en fait il y aurait pas mal de facteurs à entrer en jeu.

 

 

ENGLISH

 

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Today in English: sex. And love a bit. Sometimes. This statement is enough I think.

 

  • On Vice, an article talking about sex with demons, because it seems such a thing was quite fashionable in their own times, before Catholic church decided to put its nose inside and burn the ones who were presumably enjoying it. It seems nowadays, with occultism and wizardry coming back in fashion, it is starting again to inspire artists and journalists!

 

  • A misogynist cliche used to say (is it still? Yes probably) that women as being super sensitive creatures always fall in love faster than these freedom lovers that men are. It is really? At the end, as some studies show, not that much, even quite the opposite. To be red on Vice, obviously.

 

  • Do you remember these beautiful photos about the last real hippie communities around the world? I didn’t, but as they continue to spread, I rediscovered it and they are so pretty I cannot not share them! (and this article is not from Vice, needed to be said)

 

  • Are Millenials crazy?, seem to wonder a not negligible part of the population, including Millenials themselves. Are we having too much sex, not enough sex, are more afraid of it, should we be even more? Studies contradict each other as usual but one tendency anyway seems to rise and hurt, the several night-stand, aka the fear to actually define a relationship that will become lost between one night stand and romantic affair. Ladies and gents, here is the several night stand! (Yes, on Vice).

 

  • Outside of the fear to define, what happens when we finally manage to do it and engage into a strict monogamous romantic relationship? What happens next? It she or he the right one? What if it was a mistake??? Or how wondering all the time if our partner is the Right One is actually leading us to sentimental misery. (On…? Well, you know already)

Tchüss

J’adore les blogs. Vraiment. Je dois au final lire beaucoup plus d’articles de blogs chaque jour que d’articles de journaux en ligne. Certains de mes petits préférés sont actifs depuis si longtemps et ont un tel talent pour parler de leur passion et se raconter eux même que j’en suis venue à considérer certains comme des amis intimes. Des amis intimes qui ne savent rien de moi certes, c’est une drôle de conception de l’intimité je sais mais il n’empêche qu’elle existe, qu’elle me rassure, qu’elle me plaît et qu’elle me fait du bien alors je ne m’en prive pas.

J’ai mes blogueurs et bloggeuses favoris, mes fournisseurs de came officiels les plus adorés, comme les Youtubeurs et Youtubeuses qui ajoutent une dimension plus tangible au texte, se racontent d’une autre façon. J’en ferai peut-être une liste pour vous les présenter un jour. Mais pas aujourd’hui car aujourd’hui je suis triste. Parce qu’une de ces bloggeuses, une de ces amies qui ignore qu’elle l’est, a décidé de s’arrêter. Ou tout du moins d’arrêter le blog grâce auquel j’ai découvert sa patte à nulle autre pareille, celle qui m’a permis d’aimer une ville dans laquelle j’ai n’ai pourtant mis les pieds que cette année après plusieurs à la lire pourtant, Manon donc, la taulière de Génération Berlin.

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(Toutes les photos de Berlin présentes dans cet article sont de moi)

Ma porte d’entrée sur ce blog s’est faite grâce à un partage de cet article, qui décrivait avec lucidité et drôlerie les joies et les déboires de la vie en collocation. Charmée, j’ai ensuite entrepris de parcourir l’ensemble des billets. Parce que sous prétexte de parler de Berlin, Manon parle d’elle, de sa vie, d’expatriation, de différences culturelles, de ses amis, de ses amours et impossible donc de ne pas se retrouver dans ses différentes histoires. Mais pas que car en tant qu’artiste, elle parle d’art, de cinéma, de littérature, de musique. Parce qu’en tant qu’être humain elle parle aussi de racisme, de sexisme, de pauvreté, de drogue et d’addiction, de gentrification, qui sévit à Berlin aussi durement qu’ailleurs, d’histoire aussi, la grande, celle de Berlin Est et Ouest avec toutes ses duretés.

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